Fuensanta Sinan et Jean Hubert De Mellon

Comment tirer le meilleur parti de la technologie tout en maintenant les relations humaines qui constituent l’ADN de notre profession ?

Dans Revue Banque, Fuensanta SINAN et Jean-Hubert de Mellon parlent de l’équilibre que devront trouver les assisteurs pour exploiter les atouts des nouvelles technologies, tout en s’assurant de minimiser leur présence auprès des utilisateurs.

Cet été, 68 % des Français avaient prévu de s'évader en voiture pour leurs vacances. Cependant, le chemin vers la détente n'a pas été sans embûche, avec des crevaisons, des accidents et des pannes venant souvent troubler ces moments de quiétude. Heureusement, de nombreux voyageurs ont pu compter sur l'assistance de l’intelligence artificielle. Avant même le départ, elle les a guidés vers l'assurance la mieux adaptée à leurs besoins. En cas d'incidents, elle a travaillé sans relâche pour coordonner le dépannage des véhicules et identifier des solutions, assurant ainsi que ces vacanciers atteignent leur destination sans encombre.

Cette anticipation basée sur des données collectées par l'intelligence artificielle semble prometteuse. Elle offre la certitude aux assurés d'avoir la meilleure option face à tout incident. Cependant, la rationalité informatique se heurte brutalement à la réalité des sinistrés. La panique, l'incompréhension, les problèmes personnels uniques représentent autant d'émotions et de situations inévitables pour lesquelles la programmation des chatbots reste impuissante.

Pour véritablement profiter de l'essor numérique, les assisteurs doivent adopter une utilisation raisonnée de ces outils. Il est essentiel que cela n'entrave pas les relations humaines, considérées comme le ciment de la profession. Bien que l'efficacité prime lors de la souscription à une assurance, il est crucial de ne pas oublier que c'est la présence humaine qui permet aux assurés de traverser le stress d'un accident. La singularité humaine, avec ses nuances et spécificités, reste une particularité inimitable par l'intelligence artificielle.

La mission de l'assisteur repose sur une compréhension parfaite des habitudes de vie des assurés, des aléas auxquels ils s'exposent et des mécaniques d'accompagnement nécessaires. Chaque profil d'assuré est unique, et aucune base de données exhaustive ne peut s'adapter à ces particularités. Prenons l'exemple de Madame Martin, assurée au tiers, dont la voiture a été emboutie. Privée de son véhicule, elle se trouve limitée dans ses déplacements. Ce que l'IA ne prend pas en compte, c'est que Madame Martin est une mère célibataire de trois enfants scolarisés. Ses garanties ne prévoient pas de véhicule de prêt, laissant les enfants sans moyen de transport pour se rendre à l'école. Face à la panique de Madame Martin, l'IA montre ses limites. Le chargé d'assistance, lui, s'emploie à comprendre les spécificités du cas et met tout en ouvre pour trouver un véhicule de prêt. Cette solution aurait été refusée par le système automatisé, mais les enfants Martin pourront ainsi aller à l'école.

L'intelligence émotionnelle et situationnelle du chargé d'assistance devient alors essentielle. Contrairement aux chatbots, les chargés d’assistance sont formés pour comprendre les émotions de leurs interlocuteurs et maintenir leur sang-froid lorsque nécessaire. Cela explique probablement que 60 % des sollicitations passent par téléphone, contre seulement 6 % pour les chatbots.

Si l'intelligence artificielle atteint rapidement ses limites face au bénéficiaire, elle apporte néanmoins une valeur ajoutée considérable du côté des assisteurs. Le numérique joue un rôle essentiel dans le maintien des interactions humaines en optimisant les services en interne. Dans le domaine de l'assistance, la transformation numérique permet de mieux connaître les bénéficiaires, d'affiner leurs connaissances des habitudes et des besoins, tout en maximisant le temps consacré à l'accompagnement en cas de sinistre.

Ce qu'attendent les bénéficiaires, c'est une présence humaine qui les guide et les aide à faire face aux problèmes rencontrés. Pour les assisteurs, l'IA doit être un moyen, non une fin en soi.